La gare de Courtrai sauvée de la démolition : et maintenant ?
Date de parution : 13.11.2025
Jan Hoffman
La gare de Courtrai a connu quelques années pour le moins mouvementées. Destinée à la démolition pour laisser place à un nouveau bâtiment, elle voit désormais ses plans de remplacement abandonnés depuis septembre. La question se pose donc : que faire de ce monument au riche passé ?

La gare de Courtrai aujourd’hui
Installé sur la Conservatoriumplein, à seulement quelques minutes à pied de la gare, le cabinet Vandenborre Architecten a proposé une approche intéressante. Steven Vandenborre, gérant du bureau, côtoie le bâtiment quasi quotidiennement et n’a jamais été favorable à la construction d’un nouvel édifice. Au contraire, il aspire à donner une nouvelle dimension au volume existant, dans le respect de son architecture et de ses détails originaux.

La gare de Courtrai selon Vandenborre Architecten
Architecture de reconstruction
Avant d’entrer plus en détail dans le projet, il faut comprendre le contexte. La gare actuelle est un exemple typique de l’architecture de reconstruction de l’après-guerre. Conçue par l’architecte local Pierre Albert Pauwels en 1956, elle remplace une gare néoclassique inaugurée en 1876, elle-même succédant à une gare provisoire de 1840. La reconstruction de 1956 était indispensable : le bâtiment d’origine avait été largement détruit lors des bombardements alliés de 1944.

Image d’archive : la gare avant sa destruction lors la Seconde Guerre mondiale
L’opposition à la démolition, notamment de la part de l'Association flamande d'archéologie industrielle (VVIA) et d’autres acteurs ayant saisi le Conseil flamand pour les contestations de permis (RVV), est tout à fait compréhensible. Si la gare de Pauwels dégage une monumentalité classique, elle dépasse ce simple aspect : la symétrie et la rigueur architecturale sont ici réinterprétées dans un langage contemporain et créatif, conférant au bâtiment une valeur patrimoniale indéniable. Cette valeur est renforcée par le rôle de la gare comme trait d’union entre la ville et son environnement immédiat. C’est pourquoi, en 2023, l’édifice a été reconnu par Europa Nostra comme l’un des sept sites patrimoniaux les plus menacés d’Europe. En mars dernier, le RVV s’est prononcé positivement sur la question, et début septembre, les trois institutions impliquées dans la procédure de demande de démolition (SNCB/Infrabel, De Lijn et la ville de Courtrai) ont officiellement annoncé l’abandon définitif des projets de démolition. Cette décision a sans doute été influencée par le coût élevé d’une nouvelle construction....

Visualisation de l'approche pour la partie centrale
« En marge de cela, les projets de remplacement prévoyaient très peu d’interactions avec le quartier, ce qui aurait donné l’impression d’une intervention massive et déconnectée », avance Steven Vandenborre. « Dans ce cas précis, si l'on veut moderniser le bâtiment, il est indispensable de partir de sa structure classique, avec sa majestueuse entrée surélevée et ses deux ailes latérales plus basses, que nous nous devons de préserver. »
Ouvrir la gare sur la ville
Le bureau veut en outre étudier comment réinterpréter le volume existant, tout en respectant son architecture et les détails qui lui confèrent son identité. L’objectif est d’ouvrir l’espace de manière discrète vers le tissu urbain, et en y insufflant une nouvelle dynamique.
« Nous pensons à des usages tels qu’un café, un supermarché, des bureaux flexibles, des salles de réunion, une bibliothèque… Ces activités permettront de redonner vie au site, le transformant en un lieu de rencontre central et accessible. »

Esquisse à main levée, avec une « couronne » sur le volume existant
Une couronne pour sublimer la gare
« Nous proposons d’ajouter une couronne ou un lanterneau sur le volume existant, traduisant l’architecture originale en un signal urbain fort. Cette intervention donnera un nouvel élan au bâtiment, actuellement en retrait, et lui offrira un rayonnement renouvelé depuis les axes de vue principaux. »
Le projet se distingue également par la transformation de la différence de niveau avec la rue en une vaste estrade, permettant à l’espace extérieur de fonctionner comme une véritable place et un parc urbain.
Hommage à Adriaan Linters
« Ce projet est aussi un hommage à notre compatriote courtraisien récemment disparu Adriaan Linters, pionnier de l’archéologie industrielle en Belgique et ancien président de la VVIA. Au cœur de notre démarche : le respect du passé, fidèle à la vision de Linters, qui prônait la préservation et la gestion réfléchie des bâtiments historiques qui constituent la mémoire d’une ville. »

L’aspect de la façade autrefois. Le projet fera-t-il renaître l’atmosphère d’une place et d’un parc urbains ?